Quelques jours avant l’ouverture officielle de la campagne, Cabral Libii, candidat déclaré à la présidentielle, a dévoilé devant la presse deux projets de société complémentaires : un programme économique décliné en treize piliers et un programme politique, social, culturel et institutionnel articulé en onze axes. Dense et ambitieux, l’ensemble met en avant des priorités qu’il juge décisives pour refonder l’État et relancer l’économie nationale. C'était mercredi dernier, 24 septembre 2025, devant un parterre de journalistes dans le QG de son parti politique au quartier Nkolndongo à Yaoundé.
La réforme territoriale comme fondement
Au cœur de son projet politique, Cabral Libii propose de remplacer les dix régions actuelles par 25 Régions communautaires autonomes (RCA), construites sur des bases communautaires et géographiques. Ces RCA disposeraient d’une autonomie administrative et fonctionnelle, avec leur propre fonction publique locale, des écoles régionales d’administration et des compétences élargies en matière de santé, d’éducation, de fiscalité et de sécurité de proximité.
Le financement passerait par le relèvement de la Dotation générale de la décentralisation (DGD) à 30 % des recettes de l’État, une allocation directe des fonds aux RCA et une part des ressources minières reversée aux territoires.
Cette réforme serait accompagnée d’une nouvelle gouvernance locale avec l’élection directe des maires et présidents de région, ainsi qu’un conseil régional bicaméral intégrant une House of Chiefs.
Des priorités économiques affichées
Dans son programme économique, Cabral Libii insiste sur plusieurs leviers jugés essentiels. Il met en avant l’emploi et l’entrepreneuriat des jeunes avec la réforme du service civique, la gratuité de l’éducation entre 7 et 11 ans, la mise en place de trois filières distinctes au secondaire, la création de Centres spéciaux de capacitation (CSC) pour les jeunes exclus du système classique et la construction d’un lycée technique ou centre de formation dans chaque arrondissement. Son objectif affiché est la création de 500 000 emplois. Pour soutenir les initiatives, il annonce la mise en place d’un Fonds national de l’innovation (FNI) destiné à financer PME et start-up.
En agriculture et souveraineté alimentaire, le candidat promet la gratuité du titre foncier pour les propriétaires coutumiers, la mise en valeur de 600 000 hectares par an pendant 5 ans, la réorientation de 50 milliards FCFA de subventions vers les producteurs locaux, la construction de 180 usines de transformation de farines locales et l’équipement logistique des communes agricoles avec des camions adaptés.
Concernant l’industrialisation et l’innovation, Cabral Libii prévoit la création de zones industrielles modernes et de pôles prioritaires, la restructuration de la filière coton avec une usine moderne estimée à 200 milliards FCFA, et la création de 150 000 emplois dans le textile et la mode. Il mise aussi sur la reconstruction de la SONARA pour raffiner le pétrole localement, la relance de la transformation du bois avec 60 000 emplois attendus, le renforcement du rôle de la SONAMINES dans le secteur minier et la réservation de 35 % de la commande publique aux produits made in Cameroon. Une Banque d’industrialisation et d’investissement (B2I) verrait également le jour.
En matière d’infrastructures et d’énergie, chaque commune recevrait 500 millions FCFA pour l’entretien des routes rurales. Le programme prévoit aussi l’accès universel au numérique, l’investissement dans l’hydroélectricité, le solaire, le gaz et la biomasse, ainsi qu’une rationalisation des finances publiques permettant d’économiser 600 milliards FCFA.
La gouvernance et la lutte contre la corruption constituent un autre chantier prioritaire. Le candidat propose une loi-cadre anticorruption, la mise en place d’une commission de déclaration des biens, la suppression des immunités pour les auteurs de détournements, l’application stricte de la loi sur la transparence budgétaire et la protection légale des lanceurs d’alerte, avec des nominations fondées sur le mérite.
D’autres chantiers structurants
Au-delà de ces priorités, Cabral Libii met en avant une fiscalité optimisée et allégée, la promotion des services, de l’industrie culturelle et du sport, une plus grande implication de la diaspora dans le développement national et une politique monétaire souveraine avec une sortie progressive du franc CFA. Deux options sont envisagées : la création d’une monnaie nationale ou l’adoption d’une « monnaie trésor » pour les échanges locaux.
En matière de justice sociale, il propose un relèvement du SMIG à 140 000 FCFA, la mise en place d’une protection sociale de base et un investissement accru dans l’égalité des chances.
« La croissance n’a de sens que si elle profite à chacun », a rappelé Cabral Libii en présentant ce projet qu’il veut à la fois global, inclusif et moderne. Déjà remarqué lors de la présidentielle de 2018, il affirme aujourd’hui son ambition d’incarner une nouvelle génération politique et de proposer une alternative crédible pour un Cameroun décentralisé, industrialisé et souverain.