Plateforme Women and Mothers for Peace
Pr. Justice Diffo Tchunkam, accompagnée par la coordinatrice du SNU au Cameroun, Yaoundé, mardi 25 juin 2019 / ©GBW

Elles se sont retrouvées à la Croix-Rouge camerounaise de Yaoundé le mardi 25 juin 2019 pour encourager la non-violence et le dialogue inclusif. Un après-midi plein de prières et de lamentations.

La plateforme Women and Mothers for Peace a visiblement choisi les prières et les lamentations comme modèle de construction de la paix au Cameroun. Avec l’appui du PNUD, près de 2000 femmes se sont données rendez-vous pour appeler à la paix et à la fin de la violence dans leur pays.

Dans son allocution, Pr. Justine Diffo Tchunkam, présidente de la plateforme, rappelle que « l’heure est grave » et que les femmes se doivent de se mobiliser autour des idéaux de la nation pour sensibiliser « la conscience collective sur les dérives qui secouent notre pays dans ses fondements, dans son humanité, dans ses valeurs les plus sacrées portées par sa devise, ‘’Paix-Travail-Patrie’’ ».

Depuis quelques années, la paix est véritablement menacée au Cameroun : la secte Boko Haram dans l’Extrême-Nord, les coupeurs de routes dans l’Adamaoua et l’Est, la crise anglophone dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, sans oublier le tribalisme grandissant sur toute l’étendue du territoire. Sous la bannière de la plateforme Women and Mothers for Peace, les femmes camerounaises des dix régions ont voulu se montrer solidaires et empathiques vis-à-vis des frères et sœurs touchés.

Côté religieux, des hommes d’églises et de mosquées ont répondu présent pour donner la couleur de l’invocation du Dieu Tout-Puissant, lequel est selon eux, le seul en l’état actuel des choses, susceptible d’apporter une solution pérenne aux problèmes du Cameroun.

Quand ce n’était pas des prières, c’était des pleurs. Toutes les prises de parole étaient plus ou moins teintées d’adresses à Dieu et de coulements de larmes. Une approche assez originale qui tranche radicalement avec les formules des hommes politiques de l’heure et de la diaspora (Brigade anti-sardinards et autres). Le Cameroun a-t-il, à travers la montée de la femme, mère de l’humanité, trouvé un nouveau modèle de construction de la paix ? Même si ce n’est pas le cas, tout semble le confirmer.

Jusqu’ici, pour construire la paix, chacun y allait au gré de ses humeurs : extermination des sécessionnistes, dératisation des anglophones, mise en famine des avocats, représailles armées face aux marches et réunions publiques, instrumentalisation de la justice, mises aux arrêts et emprisonnement sans jugement, appel au tribunal militaire pour des affaires civiles, etc.

Ces méthodes ont fait leur chemin, mais rien n’a été réglé. Le Cameroun, jadis havre de paix, est devenu le pays de l’extrémisme et de la violence perpétuelle. La proposition des femmes est-elle donc salutaire ? Peut-être que oui. Sauf que les principaux acteurs censés tenir le destin du Cameroun ou censés l’influencer positivement ont brillé par leur absence, sûrement faute d’une invitation en bonne et due forme : le président de la République est en séjour en Europe ; Paul Atanga Nji n’a pas fait acte de présence ; Laurent Esso aussi. De l’autre côté de la scène, Maurice Kamto et ses sympathisants sont en prison. Ayuk Tabe, Mancho Bibixi et leurs camarades anglophones méditent leurs sorts dans leurs cellules. On en oublie certainement.

On aurait bien voulu que tout ce beau monde soit présent à la salle des banquets de la Croix rouge mardi dernier pour accueillir le message de paix venu des femmes excédées. Mais ce n’est que partie remise. Les femmes reviendront à l’assaut tant que leurs fils et leurs filles meurent inutilement chaque jour. Tant que la violence n'est pas "dans la sauce".