Mancho Bibixy Tse et le cercueil de sa condamnation. 15 ans de prison ferme /©CameroonNewsAgency
Mancho Bibixy Tse et le cercueil de sa condamnation. 15 ans de prison ferme /©CameroonNewsAgency

Le jeudi 03 février 2022, l’ONG Amnesty International (AI) a publié une lettre ouverte adressée au président de la République du Cameroun Paul Biya. Signée par 27 organisations camerounaises et internationales, elle demande au chef de l’Etat de mettre fin aux détentions arbitraires et illégales, « au moment où le Cameroun accueille la 33e édition de la Coupe d’Afrique des nations » et où « tous les projecteurs sont braqués sur le pays ».

Comme le souligne ces ONG, la célébration de la fête du football masque la réalité d’un pays où « plus d’une centaine de personnes croupissent dans les prisons », encourant de lourdes peines, privées de l’affection et du soutien de la famille. Des prisons surpeuplées aux conditions inhumaines, simplement pour avoir exercé « pacifiquement leurs droits humains consacrés par les textes juridiques internationaux ». Est pointée du doigt la loi antiterroriste draconienne de 2014, « interprétée pour criminaliser même les manifestations pacifiques ».

A titre d’exemple, AI cite quelques cas : Dorgelesse Nguessan, une coiffeuse et mère célibataire détenue pendant un an puis condamnée à cinq ans de prison pour avoir manifesté pour le compte du MRC ; Penn Terence Khan, censeur à Bambili et père de quatre enfants, qui a été « arrêté, torturé, accusé d’actes de terroriste et jugé par un tribunal militaire », puis condamné à 12 ans de prison ferme pour avoir confectionné des T-Shirts contenant des messages d’appel au fédéralisme.

AI revient aussi sur les cas du journaliste indépendant Tsi Conrad condamné par le tribunal militaire à 15 ans de prison ; Mancho Bibixy Tse et Thomas Awah Junior, condamnés respectivement à 15 et 11 ans.  Sans oublier le journaliste Kingsley Fumunyuy Njoka détenu au secret depuis plus de 20 mois, ou le jeune commerçant Intifalia Oben, qui écope de cinq ans de prison ferme, après avoir été torturé et enchainé sur son lit de malade 24h sur 24.

AI ajoute que les injustices et les humiliations se sont multipliées au fil des mois et des années, une situation qui ne laisse personne indifférent. La lettre ouverte s’achève sur une exhortation invitant le président de la République à « procéder à la réforme des lois qui sont actuellement utilisées pour criminaliser les manifestations et réunions publiques et à garantir la libération de toutes les personnes détenues arbitrairement pour avoir exercé leurs droits à la liberté d’expression et la liberté de réunion ».

Avec l’élimination prématurée des Lions indomptables en démi-finale de la CAN 2021, Paul Biya qui a coutume de mettre les résultats sportifs au service de sa propagande politique, aura-t-il suffisamment de tact pour répondre favorablement à la demande des 27 ONG ? Rien n’empêche d’en rêver.

Liste des 27 ONG signataires de la lettre :

  1. Amnesty International
  2. African Conscience
  3. All Women Together
  4. Breaking Ground
  5. Cameroon O’Bosso
  6. Centre for Human Right and Democracy in Africa (CHRDA)
  7. Centre des éducateurs solidaires des quartiers réunis (CESOQUAR)
  8. Civil Society Coalition on Human Rights and Peace in the North-West and South-West (The Coalition)
  9. Collectif des femmes pour la protection de l’environnement
  10. Committee to Protect Journalist (CPJ)
  11. Community Initiative for Peace, Social Cohesion and Development (CIPSCD)
  12. Droit O Droit
  13. Dynamique citoyenne
  14. Human is Right
  15. Integrated Development Foundation
  16. Katika 237
  17. Libra Association for Widows
  18. Mandela Center International
  19. Nouveaux droits de l’Homme (NDH)
  20. Plate-forme de la société civile pour la démocratie
  21. Plate-forme de la société civile pour les élections et la démocratie au Cameroun
  22. Réseau des défenseurs des droits humains en Afrique centrale (REDHAC)
  23. Solutions Cameroon
  24. SOS Jeunesse Libre
  25. Stand Up For Cameroon
  26. Un Monde d’Avenir
  27. Volunteers for the Consolidation of National Unity (VOCONU)