Un titulaire de la double nationalité prend le dessus face à un digne fils du régime.

L’élection du président de la Fédération camerounaise de football (Fécafoot) s’est tenue, comme prévue, le samedi 11 décembre 2021 à Yaoundé. Samuel Eto’o Fils, footballeur le plus titré d’Afrique, obtient 43 voix contre 31 pour le président sortant Seidou Mbombo Njoya. Sur les 76 délégués inscrits, il y a eu 74 votants et deux abstentions.

Les résultats sont là, incontestables, inébranlables. Mais le symbolisme de cette victoire se lit au-delà de ces simples chiffres : un titulaire de la double nationalité (camerounaise et espagnole), de surcroît issu du ghetto,  vient de battre un digne fils du régime. Un phénomène assez extraordinaire dans un pays où la corruption et la confiscation du pouvoir sont devenues le sport quotidien pour beaucoup, sans oublier la fatalité qui traque le sentier des tenants de la double nationalité.

Au Cameroun, la règle est connue de tous. Quand on organise une élection, on ne l’a perd pas, quel qu’en soit le prix à payer. La défaite de Seidou Mbombo Njoya s’est construite au moins à deux niveaux : le bulletin unique et la focalisation de sa campagne sur les délégués, plutôt que sur les personnes capables d’influencer les délégués. Programmé pour échouer ? Peut-être. Surtout quand les premiers pas n’ont pas été assez concluants ou quand la fine crème du foot, ajoutée à l’association des footballeurs professionnels, n’ont d’égard que pour le concurrent direct.

Chez Eto’o Fils, personne ne saurait expliquer de façon convaincante comment, malgré sa double nationalité, il n’a pas échoué là où ses concitoyens ont mordu la poussière. Joseph Antoine Bell (foot) et Ndédi Eyango (musique) en savent long sur ce couloir. Sa petite proximité avec le président Paul Biya a-t-elle milité en sa faveur ? On se souvient que lors de l’élection présidentielle d’octobre 2018, le goleador avait clairement et publiquement accordé son soutien à l’homme du 06 novembre 1982.   

Quels que soient les méandres où nous entraine le déroulement de cette élection historique à la Fécafoot, l’opinion est en droit de se poser des questions assez embarrassantes : le verrou de la double nationalité vient-il de se rompre ? L’ascension pour atteindre les sommets n’est-il plus freiné quand on est issu du bas peuple ? Etre fils du régime ne garantit-il plus le succès aux élections ? Autant de questions qui, même si elles sont de nature à mettre une grande frayeur dans le dos des conservateurs de la gouvernance actuelle, sonnent plutôt comme une lueur d’espoir pour les évolutionnistes et les bâtisseurs d’un Cameroun futur, d’un Cameroun plus noble. En attendant d’y voir plus clair, on n’oubliera difficilement que pour une fois, un footballeur va diriger la plus haute instance du fooball camerounais.